Dans une étude parue dans le journal « Current Biology », Joseph Schacherer et son équipe, Variation intra-spécifique et évolution des génomes, se sont intéressés à l’origine et l’évolution des levures utilisées dans le cadre du brassage et de la fermentation de la bière.
18/02/2022
C’est une longue histoire qui date de 2018, « Nous avons remarqué que lorsque l’on analyse les génomes de différentes souches de levures, il y a une évolution spécifique et convergente à chaque groupe de souches provenant du même environnement. Ainsi, l’évolution des souches impliquées dans l’élaboration du vin ou du saké ont des trajectoires différentes avec des spécificités liées à l’adaptation à leur environnement respectif. Les souches utilisées pour ces processus fermentataires sont génétiquement peu diverses et diploïdes, c’est-à-dire composées de deux paires de chromosomes, comme c’est le cas pour l’homme. »
Les souches impliquées dans la fermentation de la bière sont d’une complexité supérieure et présentent un génome polyploïde, composé de plus de deux jeux de chromosomes. Dans cette étude, l’équipe s’est plus particulièrement intéressée aux bières industrielles de type Ale issues de la fermentation par la levure Saccharomyces cerevisiae.
35 génomes analysés
Dans ce groupe fermentaire, il y a les souches germano-britanniques et belges. Chacune présentant trois ou quatre versions du génome. Les souches impliquées dans l’élaboration des bières africaines issues d’un processus artisanal ont également été étudiées.
Pour retracer leur histoire, 35 génomes sont analysés à l'aide d'une technique de séquençage à lectures longues et d’un algorithme développé par le laboratoire strasbourgeois. « Notre analyse a fourni des preuves claires que les levures de bière Saccharomyces cerevisiae ont suivi différentes trajectoires évolutives avec des origines différentes issues d’un mélange de génomes de souches de vin, présentes dans le vignoble, et des souches de produits fermentés asiatiques. »
Etudier les bières de type Lager
Deux groupes se distinguent, l’un avec une proportion plus élevée du génome provenant des souches de vin et l’autre avec une proportion plus élevée provenant de souches asiatiques. Les souches utilisées pour le brassage des bières africaines ne présentent pour leur part aucun lien avec ces bières industrielles.
L’étude met également en évidence la pression de sélection sur certains gènes notamment via des choix effectués par l’homme pour éviter les goûts désagréables. « Nous avons étudié un échantillon de petite taille. Nous souhaitons maintenant poursuivre notre étude à l’aide d’un séquençage à plus haut débit avec une collection plus importante de souches de bière. En s’intéressant par exemple aux bières de type Lager, issues de la fermentation par des levures hybrides entre les espèces Saccharomyces cerevisiae et Saccharomyces eubayanus. »
Marion Riegert