Dans une étude parue dans Nature, les scientifiques ont résolu en partie un mystère vieux de plus de 40 ans : d’où provient l’énergie qui fait tourner les noyaux atomiques après leur séparation lors du processus de fission ? Explications avec Sandrine Courtin, chercheuse au sein du Département de recherches subatomiques de l’Institut pluridisciplinaire Hubert Curien (IPHC).
29/03/2021
Sandrine Courtin étudie dans le cadre d'un projet Idex la fusion entre deux noyaux de carbone aux énergies stellaires grâce à la station de mesure Stella, installée à l’Université de Paris-Sud. La spécialiste des mécanismes de réactions et de la structure nucléaires est embarquée par ses collègues parisiens dans une nouvelle expérience sur la fission cette fois avec deux collègues de l’IPHC.
« Les mécanismes de réaction les plus courants en physique nucléaire sont la fusion et la fission. Lors de cette dernière, le noyau casse et les fragments qui en résultent sortent en tournant sur eux-mêmes. Et ce même si le noyau original n’avait aucun mouvement de rotation initiale », explique la chercheuse qui rejoint pour cette étude la collaboration internationale de physique nucléaire nu-Ball. Menée par Jonathan Wilson, du Laboratoire de physique des 2 infinis Irène Joliot Curie (IJCLab), elle regroupe 37 instituts et 16 pays. « Toute la question étant de savoir pourquoi le noyau produit par la fission tourne-t-il ? »
Comprendre la stabilité des noyaux
Pour percer ce mystère, différentes expériences sont menées au sein de la plateforme ALTO de IJCLab qui regroupe deux accélérateurs uniques en France : un électrostatique et un accélérateur linéaire d’électrons. « L’idée qui prévalait était que la rotation de fin de mécanisme était générée avant la fission », poursuit Sandrine Courtin. « Avec la collaboration nu-Ball, nous sommes parvenus à mesurer que la rotation émergeait après la cassure du noyau. Elle viendrait ainsi du comportement des nucléons -neutrons et protons- au point de scission du noyau. »
Une description fondamentale du processus de fission surprenante. « Les mécanismes de fission sont beaucoup utilisés et étudiés, comprendre comment les noyaux cassent, peut permettre de comprendre à l’inverse la stabilité des noyaux. » Cette étude a notamment des applications pratiques dans le domaine des réacteurs nucléaires.
Marion Riegert
- Retrouvez la publication dans Nature. Pour aller plus loin lire aussi : "Nouvelles perspectives sur le mécanisme de la fission nucléaire".