Prix espoirs 2020 : Remi Vuillemin dépoussière le sonnet

07/12/2020

Rémi Vuillemin compte parmi les sept chercheurs récompensés en 2020 par un Prix espoirs de l’Université de Strasbourg pour sa recherche sur la poésie anglaise des 16e et 17e siècle et plus particulièrement le sonnet.

« Mon intérêt pour la culture anglo-saxonne est venu avec ma lecture des oeuvres de Tolkien », se souvient Rémi Vuillemin qui décide alors de se lancer dans des études d’anglais. Un intérêt qui s’affine au fil du temps et amène ce maitre de conférences au sein de l’unité de recherche Savoirs dans l'espace anglophone : représentations, culture, histoire (Search) à s’intéresser à la période de la Renaissance. Après avoir obtenu l’agrégation en 2003, Rémi Vuillemin se lance dans une thèse qu’il mène en parallèle de son activité d’enseignement.

Sa passion pour la recherche s'est développée de manière progressive. « Dans un premier temps, j’ai connu la solitude du chercheur, ça a été difficile au début mais j’y ai pris goût. Le cursus français nous dirige beaucoup vers les concours, je me suis senti d’abord enseignant avant de me sentir chercheur », raconte le jeune homme qui apprécie de pouvoir mener ces deux activités en parallèle.

Son sujet ? La poésie anglaise des 16e et 17e siècles, avec un genre de prédilection : celui du sonnet et de la poésie lyrique. « Elle est parfois perçue comme classique et poussiéreuse », sourit le chercheur qui rappelle tout de même que paradoxalement c’est ce genre qui incarne la poésie par excellence à partir du 18e siècle.

Une certaine souplesse de la forme

Le petit poème caractérisé par une forme fixe de deux quatrains et deux tercets, comprenez deux strophes de quatre vers et deux de trois vers, vient d’Italie. Il est amené en Angleterre par des diplomates qui le découvrent à la cour de France. « Les Anglais l’ont adapté avec une métrique différente qui repose sur des syllabes accentuées et non accentuées et une forme de trois quatrains et un distique*. Aux 16e et 17e siècles en Angleterre le terme sonnet n’est que partiellement compris au sens strict. Souvent, les petites chansons sont aussi appelées sonnet avec une certaine souplesse de la forme. »

Le sonnet est une forme plutôt aristocratique de la culture de cour qui sera diffusée plus largement à la classe moyenne fortunée notamment suite à la publication d’une anthologie poétique. Dans les années 1590, âge d’or du sonnet, les poèmes sont surtout amoureux et plus ou moins liés à un questionnement de type moral. « Ce n’est pas forcément la vision romantique qu’on en aura plus tard », souligne le chercheur. Il note que le premier recueil de sonnets diffusé outre-manche est écrit par une femme.

La taille d’une boite d’allumettes

Ces poèmes pouvaient se transmettre lors de correspondances, les rapprochant du genre épistolaire. « Ils sont aussi présents en début d’ouvrage pour recommander l’auteur ou sont utilisés pour faire l’éloge d’un puissant et ainsi obtenir sa protection ou ses faveurs », poursuit Rémi Vuillemin que les recherches mènent dans les bibliothèques d’Oxford et de Londres. « Certains recueils ont la taille d’une boite d’allumettes. L’étude de ces textes n’est pas toujours facile. Nous sommes à la première phase de l’anglais moderne, l'orthographe et la grammaire ne sont pas encore stabilisées. »

Pour Rémi Vuillemin, le Prix espoirs est une reconnaissance de son travail, mais aussi de son domaine de recherche. Il va lui permettre de poursuivre le projet qu’il mène actuellement sur la poésie en recueils. « Souvent, les sonnets sont publiés avec d’autres œuvres. Je m’intéresse à la réception et la conception de ces recueils. J’espère pouvoir faire, si la situation le permet, un voyage de recherche cet été pour aller voir des manuscrits en Angleterre et aux Etats-Unis et pourquoi pas organiser un colloque. Avec la crise sanitaire, il y a beaucoup de points d’interrogation… »

Marion Riegert

*Trois strophes de quatre vers et une de deux vers

Les Prix espoirs 2020

Plus d'informations

Dans le cadre de la mise en œuvre du levier « Gestion des talents » de l’Initiative d’excellence (IdEx), l’Université de Strasbourg souhaite récompenser, par l’attribution des Prix espoirs de l’Université de Strasbourg, la qualité du travail et du parcours de jeunes chercheurs formant le potentiel scientifique du site strasbourgeois. L’appel à candidatures est un appel pluridisciplinaire ouvert aux maîtres de conférences, aux chargés de recherche et assimilés, bénéficiant de 4 à 8 ans d’ancienneté dans les unités de recherche rattachées à l’Université de Strasbourg.

Cette année, sept chercheurs se sont vu décerner un prix de 10 000 euros.

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