Un nouvel onglet « Ethique et intégrité de la recherche » est venu se glisser à la une du site de l’Université de Strasbourg. Derrière la partie intégrité scientifique se trouve Nicolas Giuseppone, référent en la matière depuis 2017.
17/04/2019
Comment est née cette volonté de créer un réfèrent intégrité ?
Il y a eu un mouvement mondial débuté dès les années 80 aux Etats-Unis concernant l’intégrité scientifique. En 2015, la conférence des Présidents d’universités décide de publier une charte de déontologie des métiers de la recherche signée notamment par l’Université de Strasbourg puis déclinée en son sein. En parallèle, Thierry Mandon, secrétaire d’état à la recherche commande un rapport concernant l’intégrité scientifique en France à Pierre Corvol, médecin et chercheur, aujourd’hui président de l’Académie des sciences. Rendu en 2016, il émet des recommandations qui ont eu un impact très important. Une des préconisations du rapport était de créer un référent intégrité dans chaque université et pour chaque organisme (CNRS, Inserm…). En 2018, un office de l’intégrité scientifique (OFIS) est également mis en place au niveau du Haut conseil de l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur (Hcéres).
Quel est votre champ d’action ?
Le sujet est complexe et il a fallu en définir dans un premier temps le contenu et les limites. Une de mes fonctions est de promouvoir et de faire appliquer la charte de 2015. Cette charte doit être connue de tous les chercheurs et personnels en lien avec la recherche. Fiabilité du travail de recherche, manière de communiquer les résultats, question du droit d’auteur sur les publications et les brevets, conflits d’intérêts, … L’objectif général est d’obtenir une production scientifique qui ne soit pas entachée d’irrégularités volontaires (plagiat, fabrication de données) ou involontaires. Nous réfléchissons aussi par domaines de recherche. Dans le cas d’allégations de manquements à l’intégrité scientifique, je suis en charge de l’instruction du dossier. Je peux également avoir un rôle de médiation en cas de conflits entre auteurs ou au sein des laboratoires.
Qu’est-ce qui est mis en place ?
Beaucoup de cas se situent dans une zone grise où le chercheur a pu publier un résultat comportant un problème méthodologique dont lui-même à plus ou moins conscience. Pour pallier à cela et avoir des résultats fiables, il faut former rigoureusement les futurs chercheurs aux bonnes pratiques méthodologiques. Le rapport Corvol a notamment abouti à faire inscrire dans la loi l’obligation d’une formation à l’intégrité scientifique au niveau du doctorat. Depuis la rentrée 2018, des cours magistraux et des formations ouvertes en ligne (MOOC) font partie intégrante de leur cursus.
Que se passe-t-il en cas de manquement à l’intégrité scientifique ?
N’importe qui peut faire appel à moi s’il se pose des questions ou s’il pense qu’il y a une violation de l’intégrité scientifique. Toute allégation de manquement doit m’être adressée par écrit et être signée, même si je m’engage à assurer au maximum l’anonymat du lanceur d’alerte pendant la procédure. Une fois le signalement réalisé, j’étudie la solidité des éléments fournis et je choisis de déclencher ou non une enquête. Je fais alors évaluer les allégations par une commission incluant des experts extérieurs à l’affaire. Je peux auditionner les personnes. Un rapport contenant des propositions est ensuite directement remis à la présidence. La décision quant aux suites à donner au rapport d’instruction appartient uniquement au président de l’Université de Strasbourg. Mais nous ne sommes pas là pour instruire à charge. Pour nous, au départ, tout le monde est de bonne foi.
Marion Riegert
- Pour en savoir plus : rendez-vous sur l’onglet Ethique et intégrité de la recherche.
Citation
« Les activités de recherche doivent être conduites par des chercheurs honnêtes, suivre une méthodologie rigoureuse, les publications libres d’accès, les résultats obtenus sauvegardés et disponibles de façon ouverte. » Extrait du rapport Corvol (29 juin 2016).