Les adipocytes seraient-ils une piste pour traiter le diabète de type II ? C’est ce qu’a découvert le groupe de recherche dirigé par Vincent Marion au laboratoire de génétique médicale (Inserm/Unistra) en étudiant les symptômes d’une maladie génétique rare : le syndrome d’Alström.
Le syndrome d’Alström, maladie génétique rare, se caractérise, entre autres, par l’apparition d’un diabète précoce et insulinorésistant (type II). Cette forme de diabète est généralement due à une déficience de l’insuline produite par le pancréas pour réguler le taux de sucre dans le sang. L’insuline permet en effet d’initier l’absorption du glucose par le corps, principalement au niveau des muscles, du foie, du cerveau et des tissus adipeux.
Cependant dans le cas du diabète d’Alström, seules les cellules des tissus adipeux, les adipocytes, n’absorbent pas le glucose. Vincent Marion explique que « chez ces cellules, le mécanisme d’absorption du glucose repose sur une protéine centrale, ALMS1. En absence d’insuline, ALMS1 est lié à une autre protéine, αPKC. Lorsque l’insuline est détectée par l’adipocyte, ALMS1 se sépare et entraine une cascade d’interactions cellulaires menant à l’assimilation du glucose ». Or, le syndrome d’Alström entraine une défaillance génétique qui altère ALMS1 et grippe le mécanisme.
Tromper la mécanique cellulaire pour réguler le taux de glycémie des patients diabétiques
À partir de ce constat, le groupe de recherche de Vincent Marion(1) a imaginé une nouvelle approche dans le traitement du diabète en ciblant spécifiquement l’activité d’ALMS1. En collaboration avec une équipe de l’université d’Adélaïde (Australie), les chercheurs sont parvenus à modéliser la structure moléculaire complète de la protéine, puis à identifier son site d’interaction avec αPKC. Ils ont alors développé une petite molécule interférente, un peptide. « L’idée avec ce peptide était d’empêcher la liaison ALMS1/αPKC, mais sans gêner le mécanisme d’absorption du glucose au cœur de la cellule, même en l’absence d’insuline. »
Une intuition confirmée par une première série de tests cellulaires in vitro. Forts de ce résultat, les chercheurs ont poussé leur étude sur des souris devenues intolérantes au glucose, donc diabétiques. « En administrant du glucose à ces souris, combiné avec notre peptide, nous avons constaté que leurs taux de glycémie dans le sang revenaient à un seuil normal en moins de deux semaines », s’enthousiasme Vincent Marion.
À l’origine d’un premier dépôt de brevet, cette étude est depuis mars 2016 l’objet du projet DiabetAlms(2), pour la conception et la maturation de nouveaux candidats peptidiques interférents. Prochaine étape pour le groupe de recherche de Vincent Marion : la création d’une start-up entièrement dédiée à cette nouvelle stratégie à Strasbourg.
Guillaume Thépot
(1) Groupe CMAT (Ciliopathie modeling and associated therapy), Laboratoire de génétique médicale (UMR 1112, Inserm/Unistra), Institut de génétique médicale d’Alsace
(2) Programme de maturation soutenu par la Satt Conectus Alsace