09/02/21
Vie et santé
Le DNP (2,4-dinitrophénol) est une molécule permettant de brûler des calories en forçant nos cellules à produire de la chaleur. Ses effets sur la perte de poids ont été découverts au début des années 30, mais son usage chez l’homme a rapidement été interdit en raison de sa toxicité aigüe et des nombreux décès associés. Après des décennies d’absence, le DNP a fait son retour comme produit minceur ces dernières années via la vente illégale en ligne. Face à l’accroissement du nombre d’usagers et à plusieurs décès (notamment au Royaume-Uni), INTERPOL a lancé une alerte mondiale au sujet du DNP en 2015.
Malgré ses effets délétères, l’agence américaine des produits alimentaires et médicamenteux (FDA) a récemment autorisé des essais cliniques sur le DNP dans le but de tester son efficacité dans la lutte contre différentes pathologies humaines telles que Parkinson ou la sclérose en plaque. Bien que le DNP soit un produit toxique, il a été utilisé à faibles doses en recherche fondamentale sur des modèles animaux pour tester des théories liées au vieillissement. Il a par exemple été démontré en 2008 qu’à faible dose il pourrait allonger l’espérance de vie chez des souris de laboratoire. Antoine Stier, chercheur à l’Université de Turku en Finlande, suspectait cependant que cet effet bénéfique chez la souris soit lié à la prévention de l’obésité, qui pourrait masquer une toxicité chronique du DNP qui serait visible chez des animaux ou humains non-obèses.
Une réduction de l’espérance de vie d’environ 20%
Une nouvelle étude publiée dans la revue Comparative Biochemistry and Physiology Part C (Elsevier) menée par Antoine Stier et François Criscuolo à l’Institut pluridisciplinaire Hubert Curien (CNRS / Université de Strasbourg) a donc utilisé des diamants mandarins (un modèle aviaire ne présentant pas d’obésité liée à l’âge, contrairement à la souris) pour explorer les effets à long terme (le traitement ayant duré plus de 4 ans) de la prise de DNP sur des marqueurs de vieillissement cellulaire et sur l’espérance de vie. « Nous avons traité les oiseaux avec une dose de DNP par kg étant dans la gamme de ce qui est consommé illégalement chez l’humain, et qui n’a pas montré d’effets délétères à court-terme chez le diamant mandarin bien que conduisant à une augmentation modérée du métabolisme », rapporte François Criscuolo.
Bien que les oiseaux traités au DNP aient eu l’air en parfaite santé, ayant des performances physiques et des marqueurs sanguins de vieillissement similaires aux individus contrôles, cette nouvelle étude rapporte que le DNP conduit à une réduction de l’espérance de vie d’environ 20% (soit 1 an chez ces oiseaux). « Si une réduction d’espérance de vie du même ordre de grandeur a lieu chez l’humain cela est alarmant. Par ailleurs, la consommation illégale est très difficilement quantifiable », souligne Antoine Stier.
A ce stade, de plus amples études sur des modèles animaux semblent indispensables pour permettre à la communauté scientifique et aux agences de santé de statuer sur une utilisation potentielle du DNP comme médicament chez l’homme.
- Retrouvez l'article complet sur le site de l'Institut écologie et environnement du CNRS