07/06/21
Vie et santé
La pandémie de Covid-19 qui dure depuis maintenant près d’un an et demi n’a pas seulement affecté la santé physique : les troubles psychiques sont en forte augmentation, particulièrement chez les plus jeunes. Psychiatre pour enfants et adolescents au sein du Service de Psychiatrie pour Enfant et Adolescent des Hôpitaux Universitaires de Strasbourg, Julie Rolling fait le point sur leur situation et nous donne des clés pour aborder avec eux la très délicate question du suicide.
The Conversation : La crise sanitaire que nous traversons à des effets importants sur la santé psychique de nombre de nos concitoyens. Qu’en est-il des plus jeunes ?
Julie Rolling : Les chiffres de Santé Publique France indiquent qu’en 2021, les épisodes dépressifs auraient augmenté de 43 % chez les 12-17 ans par rapport aux autres années et les idées suicidaires auraient progressé de 31 %. Dans ce contexte, depuis le début de l’année, les passages aux urgences pédopsychiatriques ont explosé (+80 %), avec plus de 79 % d’hospitalisation dans les suites de ces passages.
Incertitude sur l’avenir, perte des repères, « culpabilisation » d’être des vecteurs de contamination, angoisse liée à ladite contamination… Nous vivons une période inédite pour l’ensemble de la population, notamment pour les plus jeunes. Même si de nombreux adolescents traversent cette pandémie sans difficulté majeure, pour d’autres la pandémie a eu un impact sur le plan psychique.
Les mesures sanitaires qui ont été mises en place sont tout à fait nécessaires, elles ont permis de juguler la pandémie. Cependant, les confinements successifs et la distanciation sociale ont pu fragiliser certains liens sociaux. Privés de sport, de loisirs, de cours en présentiel, les jeunes ont moins d’interactions, alors que « squatter ensemble » est un mode relationnel et une activité en soi pour les adolescents. Même s’ils réinventent d’autres espaces, notamment sur les réseaux sociaux, ne plus avoir tous ces temps sociaux extrascolaires et extrafamiliaux est problématique pour eux. Ce sont des temps à l’abri du regard des adultes, des temps « d’aération et de respiration » par rapport à la pression scolaire et/ou la pression familiale.
Par ailleurs, les restrictions de sorties, les exigences scolaires, l’incertitude qui se prolonge, l’absence de réponses claires à leurs questionnements constituent une accumulation perturbante, dans un moment de vie où ils sont en pleine construction identitaire.
Enfin, d’un point de vue physiologique, la surconsommation des écrans a également un impact sur la dégradation de la santé psychique, en raison des modifications du sommeil, et notamment de la dette de sommeil qu’elle induit.
- Retrouvez l'intégralité de cette interview de Julie Rolling, psychiatre pour enfants et adolescents au Service de psychiatrie de l'enfant et de l'adolescent des Hôpitaux universitaires de Strasbourg, sur theconversation.com