Bouddhisme et culture de consommation, mêmes valeurs ?

05/11/2019

Bien-être, quête du bonheur, développement personnel... en apparence éloignés, le bouddhisme et la culture de consommation partagent plus de valeurs qu’il n’y parait. Zuzana Bartova, chercheuse au sein de l’équipe d’accueil de Théologie protestante, revient sur le façonnement du religieux par la culture de consommation et le consumérisme adopté comme style de vie.

« Arrivé en France dans les années 60, le bouddhisme se découvre souvent par la culture du bien-être développée dans notre société avec une valeur hédoniste importante », souligne d’emblée Zuzana Bartova dont la réflexion sociologique est partie d’une interrogation initiale : « Comment être bouddhiste en Occident ? » De cette interrogation elle fait un sujet de thèse portant sur les pratiquants convertis au bouddhisme en République tchèque et en France qui l’amène à s’intéresser au lien entre bouddhisme et culture de consommation.

Son idée ? Montrer à quel point la culture de consommation est devenue un élément structurel du religieux. « Cette dernière n’est pas à entendre d’un point de vue négatif, c’est un fait structurant de la culture moderne où la pratique de consommation est dominante avec les valeurs associées. » Si les pratiquants bouddhistes se positionnent de manière alternative du point de vue matérialiste, il s’avère qu’ils rejoignent la culture de consommation à travers d’autres valeurs. « Pour être réellement alternatif, il faudrait vivre dans la forêt », sourit la chercheuse.

Une activité qui demande de l’argent

Pour son étude, Zuzana Bartova part à la rencontre de 48 pratiquants bouddhistes de différents courants, (Nichiren, zen et tibétain) dans cinq centres. « J’ai suivi des enseignements et interrogé une vingtaine de directeurs de centres pour comprendre leur organisation et regarder comment les pratiquants réceptionnent la pratique et l’expérience qu’ils en font : moteur de vie, de transformation... »

Premier constat : la majorité des pratiquants sont de classe moyenne. « Cela s’explique par le fait que c’est une activité qui demande de l’argent, du temps pour étudier, se questionner et aussi des ressources culturelles pour considérer comme option le bouddhisme et valoriser la réflexivité ou le développement de soi qu'il promeut. Des éléments auxquels n’ont pas forcément accès les classes populaires. »

Le corps comme élément performatif

Les pratiquants adoptent le bouddhisme pour construire leur identité individuelle, dans une quête de sens, de développement personnel et de bonheur. Des notions partagées avec le consumérisme. « Ce sont des personnes engagées dans la pratique qui ont une éthique de vie et détiennent certaines valeurs qui forment un tout, un style de vie propre à la société de consommation qui comme le bouddhisme est une culture d’expérience et de ressenti avec le corps comme élément performatif pour se transformer. »

L’individu et l’importance de son choix personnel et de sa liberté sont des valeurs clés de la culture de consommation mises en avant dans le bouddhisme qui personnalise l’activité dans une logique de service individualisé. « Sans oublier une notion de sociabilité importante avec des rencontres et des séjours dans les centres, comparables à la sociabilité des centres de fitness avec un lien structurel commun : un caractère localisé, électif, volontaire, émotionnel, ou encore non contraignant. »

Marion Riegert

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