Mal aimé des manuels et des cours de médecine, le clitoris est un organe peu enseigné sur lequel figurent des informations contradictoires. Marie Chevalley a décidé de s’attaquer à la question à travers sa thèse de médecine soutenue en septembre 2021 et intitulée : « Etat des lieux des connaissances de l’anatomie et de la physiopathologie du clitoris chez les médecins en France. »
03/11/2021
« A la question, sauriez-vous représenter schématiquement un clitoris ? Seuls 12,6 % des interrogés répondent « non », pourtant les détails anatomiques du clitoris sont peu connus », glisse Marie Chevalley qui ne juge pas. « J’ai moi-même pris connaissance de ma méconnaissance sur l’anatomie du clitoris en écoutant une émission de France Inter. »
Pour comprendre les raisons de cette lacune, la médecin généraliste décide de mener l’enquête dans les ouvrages de médecine. « Sa taille n’est pas définie avec précision, sa représentation varie, parfois il y a des erreurs, d’autres fois ce n’est que le gland qui est montré ou il est intégré à une coupe du périnée. J’ai vu des schémas du sexe féminin à destination des patientes dans lesquels le clitoris n’était même pas dessiné », raconte la jeune femme. Cette dernière questionne également ses proches à l’aide d’un modèle de clitoris imprimé en 3D, déniché sur le site d’Odile Fillod, une de ses directrices de thèse, Clit’info.
84,4% des interrogés n’ont jamais eu de formation sur le sujet
Représentation schématique du clitoris et du pénis, taille moyenne, physiologie, pratique médicale… pour sa thèse, elle interroge, à travers un formulaire d’une trentaine de questions, 1 168 médecins, internes, généralistes et gynécologues, d’une moyenne d’âge de 30,5 ans.
Résultat : La taille du clitoris est sous-estimée par la majorité des répondants. 17,1 % pensant qu’il mesure entre 0,5 et 1 cm contre environ 10 cm dans la réalité. 84,4 % des interrogés n’ont jamais eu de formation sur le sujet, 70 % pour les gynécologues. « Leurs connaissances anatomiques restent partielles même si elle est meilleure chez les plus jeunes et les gynécologues. »
Un résultat qui peut s’expliquer en partie par un manque de sources médicales. La source d’information la plus fréquemment utilisée par les répondants étant non médicale : notamment les sites web grand public ou encore les réseaux sociaux, à l’image du compte Instagram Gang du Clito. « Une majorité de répondants évoque également une absence de besoin de rechercher ces informations. » Autre problème, historique cette fois. « Comme il n’a pas de rôle identifié dans la reproduction, le clitoris a été mis de côté. Les détails anatomiques du pénis étant mieux connus car plus détaillés dans les livres. »
Pas de référentiel des pathologies du clitoris
Il n’y a pas non plus de référentiel des pathologies du clitoris, pourtant il peut être l’objet d’infections, de tumeurs… Sans oublier les problèmes d’excision. « 34,2 % des répondants au moins ont rencontré une pathologie clitoridienne et 54,5 % ont déjà rencontré une plainte sexuelle féminine suite majoritairement à une douleur ou une perte de plaisir. Le besoin d’être formé est réel. »
Pour faire un premier pas en ce sens, le questionnaire est assorti d’informations pratiques. « Suite à leur lecture, les médecins généralistes et les gynécologues évoquent qu’il y aura un impact bénéfique sur leur pratique à travers une plus grande vigilance sur les potentielles atteintes ou encore lors de l’examen clinique », précise Marie Chevalley qui pour continuer d’informer sur le sujet prévoit de publier sa thèse.
Marion Riegert