Didier Ménard, retour sur une carrière dédiée au paludisme

18/01/2022

Didier Ménard a posé ses valises à l’Institut de parasitologie et de pathologie tropicale de Strasbourg en septembre 2021. Le chercheur y poursuit ses travaux sur le paludisme. Travaux pour lesquels il a déjà obtenu de nombreux prix.

Après des études de pharmacie et un internat en biologie médicale, Didier Ménard se dirige vers le secteur privé avant d’intégrer le réseau international des Institut Pasteur en tant que pharmacien biologiste. Il obtient un premier poste en Nouvelle-Calédonie, puis à Bangui en 2000 où il réalise sa thèse sur le paludisme. Le chercheur rejoint ensuite l’Institut Pasteur de Madagascar comme chef d’unité paludisme.

Dans le paludisme, il existe plusieurs espèces dont Plasmodium falciparum, qui peut être mortelle, et Plasmodium vivax, la plus répandue géographiquement, capable de se développer dans les zones tempérées. « Louis XIV l’a certainement eu », glisse le parasitologue. Dans les années 60/70, les chercheurs remarquent que les sujets africains n’ont pas d’antigène Duffy à la surface de leurs globules rouges, une protéine qui sert de porte d’entrée à Plasmodium vivax et sont donc naturellement protégés. « A Madagascar, en 2009, nous avons trouvé pour la première fois des personnes d’origine africaine infectées par le parasite remettant en cause le dogme établi. »

Direction ensuite Paris, puis le Cambodge où il pose ses microscopes de 2010 à 2017. « C’est là qu’à chaque nouveau traitement, les premières résistances du parasite Plasmodium falciparum sont apparues. C’est le cas de la chloroquine dans les années 50/60. Une résistance qui s’est ensuite répandue en Afrique causant un excès de décès liés au paludisme. Le phénomène s’explique notamment par la forte pression médicamenteuse en Asie.

Un nouveau test in vitro pour distinguer les parasites résistants

Depuis les années 2000, l’artémisinine est utilisée en combinaison avec une molécule dite partenaire. « Les premiers signes de résistances, avec une élimination plus lente des parasites, chez les personnes traitées sont apparus au Cambodge 10 ans plus tard. En 2013,  Didier Ménard et son équipe développent un nouveau test in vitro permettant de distinguer les parasites sensibles des parasites résistants afin de mieux les étudier.

« Ensuite, nous sommes parvenus à caractériser les signatures moléculaires rendant les parasites résistants à ce traitement. Il s’agit de plusieurs mutations dans le gène Pfkelch13 (K13). Nous avons ainsi pu faire une étude à large échelle pour connaitre la distribution et la fréquence de ces parasites. » Une découverte qui lui vaut en 2015 un prix de l’Académie de médecine puis en 2016 de l’Académie des sciences.

De 2017 à 2021, Didier Ménard retourne en France, à Paris, toujours au sein de l’Institut Pasteur. Il développe un projet, en collaboration avec l’OMS, de surveillance de la résistance du parasite au niveau mondial. « En 2020, nous avons détecté les premiers parasites résistant à l’artémisinine en Afrique. » Avec à la clé une nouvelle publication et un nouveau prix de l’Académie des sciences en 2021. « La surprise étant que les parasites résistants étaient d’origine africaine, et qu’ils ne venaient pas d’Asie. »

« Avancer en expérimentant »

Depuis septembre 2021, le chercheur est à l’Institut de parasitologie et de pathologie tropicale de Strasbourg. « Cela me permet de m’orienter vers une recherche plus appliquée et clinique centrée sur la maladie et les malades. »

Didier Ménard souhaite ainsi mieux comprendre comment Plasmodium vivax est capable d’infecter les sujets dépourvus de l’antigène Duffy. Deux projets ANR sont en cours en collaboration avec des chercheurs de Madagascar et d’Ethiopie. Un autre projet lui tient à cœur : « A Madagascar, dans l’ile Sainte-Marie nous souhaitons éradiquer le paludisme en mettant en place toutes les stratégies disponibles. »

Son rêve ? Terminer sa carrière sur des actions concrètes. « J’aime apprendre, évaluer, corriger le tir et avancer en expérimentant. La recherche, c’est de la ténacité. Ce n’est jamais routinier, on se pose une question, on y répond, on découvre autre chose qui amène une nouvelle question mais il faut faire attention à ne pas se disperser, toujours garder en tête son objectif », conclut le chercheur nommé Distinguished International Fellow de l'American Society of Tropical Medicine and Hygiene en 2021 pour l’ensemble de sa carrière.

Marion Riegert

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