En étudiant un certain type d’hétérostructure composée de deux cristaux bidimensionnels : le graphène et un dichalcogénure de métal de transition, les chercheurs ont remarqué que le premier agissait comme un filtre en simplifiant le spectre d’émission de lumière du second. La découverte, réalisée en collaboration avec des chercheurs de Toulouse, a été publiée dans Nature Nanotechnology. Elle permettra de proposer de nouveaux types de dispositifs optoélectroniques.
30/03/2020
Stéphane Berciaud et son équipe étudient des cristaux 2D. « Il s’agit de feuillets atomiques épais, d’un ou quelques atomes seulement, dotés d’un ordre cristallin bien défini. Ces feuillets s’empilent sous forme de cristaux lamellaires faciles à "effeuiller", présents dans la nature ou synthétisables en laboratoire », explique le chercheur à l'Institut de physique et chimie des matériaux de Strasbourg (IPCMS) qui utilise la spectroscopie optique. Cette technique peu invasive consiste à sonder la structure spatiale des cristaux et leurs propriétés électroniques à l’aide des photons émis par un laser.
Le plus connu de ces cristaux 2D est le graphène, brique de base du graphite qui constitue nos mines de crayon. Composé d’un plan d’atomes de carbone organisés en nids d’abeilles, c’est un métal qui, à ce titre, n’émet quasiment pas de lumière. Très robuste mécaniquement et résistant à l’échauffement, le graphène est aussi utilisé pour réaliser des circuits électroniques aux propriétés remarquables permettant ainsi d’envisager de nouveaux dispositifs : transistors, détecteurs de lumière, capteurs de masse…
Des partenaires idéaux
Autre famille de cristaux 2D : Les monofeuillets de dichalcogénures de métaux de transition, notés TMD, comme la molybdénite de formule chimique MoS2 qui est à la base de lubrifiants mécaniques. « Ce sont des semi-conducteurs pouvant absorber et réémettre efficacement des photons à des énergies bien définies, dans les domaines visible et proche infra-rouge. »
Ensemble, le graphène et les TMD forment des partenaires idéaux. « Là où l’un est limité, l’autre sait faire et inversement », souligne Stéphane Berciaud qui réalise avec son équipe des hétérostructures composées d’un empilement de graphène et de TMD.
Mieux contrôler l’émission de lumière
Résultat : « Le graphène nettoie le spectre d’émission des TMD, ce qui signifie qu’il se comporte comme un filtre. Ce travail montre ainsi un moyen facile de mieux contrôler l’émission de lumière. » Une découverte prometteuse avec des applications en optoélectronique, notamment dans les dispositifs photovoltaïques et électroluminescents, ou encore pour les électrodes transparentes des écrans tactiles.
Prochaine étape pour les chercheurs, mieux comprendre les détails microscopiques du mécanisme de filtrage et essayer de l’optimiser. « Après quoi, nous aimerions exploiter ce mécanisme pour pouvoir l’allumer et l’éteindre et ainsi l’utiliser dans des dispositifs opto-électroniques voire même dans des dispositifs opto-électro-mécaniques composés de cristaux 2D suspendus comme des peaux de tambour… d’épaisseur atomique. »
Marion Riegert