Une équipe de recherche internationale coordonnée par Thomas Baumert, directeur de l’Institut de recherche sur les maladies virales et hépatites, a mis pour la première fois en évidence l’impact des changements épigénétiques induits par le virus de l’hépatite C dans le développement d’un cancer du foie après guérison. Ces résultats ont été publiés dans la revue Gastroenterology.
16/05/2019
Ces dernières années, la recherche sur les traitements antiviraux a pris des proportions inespérées et 95% des patients atteints d’une hépatite C qui sont traités par les antiviraux à action directe peuvent désormais être guéris en 2 à 3 mois. Reste un problème : même si le virus est éradiqué, les patients ont toujours un risque plus élevé de développer un cancer du foie.
Pour comprendre quels dommages induits par le virus dans les tissus contribuent au développement d’une tumeur, les chercheurs de l’Institut de recherche sur les maladies virales et hépatites (Inserm – Université de Strasbourg) ont analysé des tissus de foie de patients atteints d’hépatites chroniques C guéris par antiviraux à action directe.
Des biomarqueurs pour une détection plus précoce
Résultat : « Nous avons constaté que le virus introduit des modifications épigénétiques, c’est-à-dire des altérations portant sur les histones, protéines qui donnent sa structure à l’ADN. Ces modifications changent la structure 3D de la chromatine* et donc l’expression de certains gènes », détaille Mirjam Zeisel, membre du laboratoire. « Beaucoup des voies dans lesquelles ces gènes sont impliqués sont des voies importantes dans les cancers. » Des observations validées sur un modèle de souris génétiquement modifiées et présentant un foie humanisé, c’est-à-dire comprenant des cellules de foie humain.
L’étude met ainsi en évidence que les changements épigénétiques induits par le virus de l’hépatite C ne sont pas réversibles par les traitements antiviraux. « Il y a une nécessité de suivre les patients une fois guéris car les cancers du foie sont souvent diagnostiqués tardivement et difficiles à soigner. » Un suivi qui pourrait passer par l’analyse de l’expression de certains gènes pour une détection plus précoce. « De manière intéressante, certains de ces changements épigénétiques sont également présents dans les tumeurs du foie de patients atteints de stéato-hépatite métabolique. »
Les chercheurs ont soulevé de potentiels biomarqueurs dont l’expression change dans le foie avant le développement d’une tumeur. « Cela pourrait contribuer à mieux identifier les patients qui vont développer ou non des cancers. » Et après ? « Nous allons notamment étudier si ces biomarqueurs pourraient s’appliquer à d’autres patients ayant un risque de développer un cancer du foie comme les patients atteints d’hépatite B chronique. »
Marion Riegert
*La chromatine désigne l’assemblage de l’ADN avec ses histones.
Une bourse ERC-Proof of Concept pour Thomas Baumert
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Le professeur Thomas Baumert (Inserm/Université de Strasbourg) obtient une bourse ERC-Proof of Concept du Conseil européen de la recherche : celle-ci va permettre à son équipe de recherche de poursuivre le développement d’une nouvelle approche thérapeutique du cancer du foie.