Après le populisme de gauche ou encore les gilets jaunes, un séminaire de recherche de la faculté de philosophie s’attaque à la question de l’universel à travers 12 interventions réparties durant le premier semestre. Ce dernier s’inscrit dans la thématique plus large « Penser l’émancipation », fil conducteur des séminaires depuis quatre ans.
24/09/2021
Depuis quelques années, la question de l’universalité revient au premier plan des débats et des polémiques actuelles. « Le « woke », c’est à dire le fait d’être attentif aux discriminations notamment à l’université, est l'objet de polémiques venues de l’extrême droite qui le présente comme une menace contre l’universalisme », explique Jacob Rogozinski, co-organisateur du séminaire et chercheur à la faculté de philosophie.
Dans ce cycle de séminaires marqué par 12 interventions, les chercheurs souhaitent prendre position en s’interrogeant sur l’universalisme et sa définition. « L’université est le lieu où s’élaborent des savoirs universels depuis le Moyen Age. On soutien souvent qu'il est lié à la tradition française qui considère que la France est la patrie de l’universel et donc de l’universalité. »
Plusieurs types d’universalismes
Cet universel est déconstruit par différentes réflexions car il exclut certaines catégories d’hommes, « à l’image de la déclaration des droits de l’homme et du citoyen qui ne prend pas en compte l’exploitation des prolétaires », souligne le chercheur qui précise que Karl Marx prône ainsi une universalité plus vaste, une "émancipation sociale universelle". Autres exclus du discours de l’universalité, les colonisés et les femmes.
Etienne Balibar, auteur Des universels, évoque pour sa part plusieurs types d’universalismes qui inévitablement sont conflictuels. « Par exemple, la laïcité, terme difficile à traduire, renvoie à l’histoire de la France. De quel droit cette laïcité pourrait-elle se dire universelle alors que les grandes religions pourraient aussi le revendiquer ? », poursuit Jacob Rogozinski qui conclut que le séminaire ne défend pas une position doctrinale et que les chercheurs sont eux-mêmes divisés sur la question. « Peut-on déconstruire l'universel sans renforcer les particularismes identitaires ? Et peut-on le remettre en question sans reconduire d’autres formes de l’universel ? Y aurait-il alors des universels ? »
Marion Riegert