Nicolas Martin remonte le temps grâce aux premières étoiles de l’univers

06/11/2018

Série prix espoirs 2018. Nicolas Martin, chargé de recherche à l’Observatoire astronomique de Strasbourg, n’a de cesse de scruter les étoiles, mais pas n’importe lesquelles... Avec une équipe internationale de chercheurs, il a mis en lumière une étoile quasiment vierge d’éléments lourds comptant parmi les premières de l’univers. Une recherche qui s’inscrit dans le domaine de l’archéologie galactique pour laquelle il a reçu un prix espoir.

L’œil dans le télescope, Nicolas Martin traque les traces de galaxies lointaines et d’étoiles de nos environs pour tenter de comprendre les origines de l’univers. « Le Graal serait de trouver une étoile primordiale mais comme elles sont plus massives, elles ne vivent pas longtemps. » Soit tout de même quelque 10 millions d’années contre plus de 4 milliards pour le soleil… L’astrophysicien peut cependant compter sur la découverte d’étoiles de deuxième ou de troisième génération pour avancer dans ses recherches.

Une étoile sur 1 million

Survivantes des premiers âges de l’univers, ces étoiles sont caractérisées par leur faible quantité en éléments lourds. « L'univers primordial contenait presque exclusivement de l'hydrogène et de l'hélium. Au cours de leur vie, les étoiles produisent des réactions qui transforment l’hydrogène en d’autres éléments. Lorsqu’une étoile meurt, elle va redonner les éléments lourds qu’elle contient aux gaz environnants formant ainsi de nouvelles générations d’étoiles enrichies par ces restes. »

Pour les détecter, l’astrophysicien peut jouer la carte de la chance, mais avec une étoile sur 1 million de l’ordre de l’étoile primordiale, mieux vaut trouver une technique plus efficace. Depuis 4 ans, dans le cadre du projet Pristine, une équipe internationale de chercheurs dirigée par Nicolas Martin, tente de réaliser une cartographie du ciel. Sa méthode ? Chercher dans des longueurs d’ondes restreintes caractéristiques de ces étoiles. Le tout, à l’aide d’un filtre spécifique placé dans une caméra du Télescope Canada-France-Hawaï (CFHT).

Une lumière d’il y a 20 000 ans

Les données ainsi récoltées sont analysées à l’Observatoire astronomique de Strasbourg permettant d’éliminer 99% des étoiles. Le 1% restant est étudié de manière plus approfondie grâce à un télescope situé aux Canaries. A raison de 10 étoiles par nuit pour 150 nuits passées sur place. Sur ce millier d’étoiles suivies, une en particulier attire l’œil des chercheurs. « Cette étoile, dont nous percevons la lumière d’il y a 20 000 ans, est quasiment vierge d'éléments lourds. Leur quantité est 10 000 à 100 000 fois inférieure à celle mesurée dans l'atmosphère de notre Soleil. Nous n’avons pas son âge réel mais il s’agit sans doute d’une étoile des premiers âges de l’univers. »

L'étoile vient rejoindre la dizaine d’autres déjà découvertes par les chercheurs. « Nous espérons en avoir une centaine au total pour pouvoir en reproduire les propriétés globales et réaliser des statistiques. » Un chiffre que Nicolas Martin pourrait atteindre plus tôt que prévu grâce à une nouvelle collaboration Royaume-Uni, Espagne, Pays-Bas, France dans le cadre du projet WEAVE. « Nous passons à l’ère industrielle du projet. Notre travail actuel consiste à chercher les étoiles une par une. Avec ce nouveau relevé, nous récupérerons des dizaines de spectres d’un coup. Nous allons avoir un relevé systématique de l’hémisphère nord. » Soit plus de 10 000 étoiles intéressantes en 5 ans. De quoi remonter toujours plus loin vers la formation de l’univers.

Marion Riegert

  • Pour aller plus voir lire aussi notre article consacré à tous les Prix espoirs 2018.

Une brève histoire d’archéologie galactique

Good to know

Après un DEA d’astronomie et d’astrophysique, Nicolas Martin décide de se lancer dans une thèse dans le domaine de l’archéologie galactique un peu par hasard. La discipline vise à étudier les restes de petites galaxies absorbées par la nôtre au cours du temps, mais aussi les étoiles les plus anciennes de notre galaxie, la Voie lactée. « J’avais fait un stage avec Rodrigo Ibata à l’Université de Strasbourg, ça s’est bien passé et nous travaillons toujours ensemble. Dans le monde de la recherche, il faut être bon et chanceux, j’ai eu cette chance. »  L’astrophysicien passe ensuite 5 ans à l’Institut Max Planck pour l’Astronomie d’Heidelberg. Depuis 2012, il est chargé de recherche à l’Université de Strasbourg où il travaille sur deux thématiques : « Je cherche à trouver les restes de galaxies naines qui me permettent de comprendre combien de galaxies ont été absorbées par la nôtre au fur et à mesure de sa formation. » Sans oublier de trouver les étoiles les plus anciennes de la Voie lactée pour tenter de percer les mystères de leur formation.

Réseaux et partenaires de l'Université de Strasbourg

Logo Établissement associé de l'Université de Strasbourg
Logo de la Fondation Université de Strasbourg
Logo du programme France 2030
Logo du CNRS
Logo de l'Inserm Grand Est
Logo du programme HRS4R
Logo du réseau Udice
Logo de la Ligue européenne des universités de recherche (LERU)
Logo de EUCOR, Le Campus européen
Logo du réseau Epicur