Collines recouvertes d’éoliennes, panneaux solaires sur des lacs … Comment le cadre juridique traite-t-il le concept de paysage dans le contexte de la transition énergétique ? Eléments de réponse avec Elisabeth Lambert, dont le projet compte parmi les huit projets transfrontaliers lauréats Seed Money 2020/21.
23/03/2021
Selon la définition du Conseil de l’Europe : « Le paysage désigne une partie de territoire telle que perçue par les populations, dont le caractère résulte de l'action de facteurs naturels et/ou humains et de leurs interrelations ». « C’est un concept très large, subjectif. Ce n’est pas forcément la carte postale de la Corse, la question des paysages se pose aussi en ville avec par exemple les monuments historiques », explique Elisabeth Lambert, directrice de recherche CNRS au sein de l’unité mixte de recherche Sociétés, acteurs, gouvernement en Europe (Sage), qui revient tout juste de Normandie « où beaucoup d’éoliennes viennent justement perturber la vue. »
Partir de la réglementation existante
Droit de l’environnement, de l’énergie, droits fondamentaux des individus, droit administratif et des collectivités territoriales, pour s’intéresser à cette problématique la chercheuse, au côté de Melis Aras, post-doctorante, s’est alliée à deux autres juristes des universités de Freiburg et de Haute-Alsace. « Nous souhaitons voir comment les paysages sont protégés, est-ce qu’il y a une mention directe de leur protection ou est-ce que cela se fait via la protection de la biodiversité ? Est-ce que les énergies utilisées sont compatibles avec le développement durable, les éoliennes par exemple ont une durée de vie limitée », interroge Melis Aras.
En Europe, la première convention qui protège le paysage date de 2000. En droit administratif français, la réglementation de la mise en place des énergies renouvelables est complexe avec des contestations en justice plus nombreuses qu’en Allemagne contre les éoliennes. « Si bien qu’en France, il a fallu limiter ces recours car cela freinait les projets », souligne Elisabeth Lambert qui précise que les chercheurs vont partir de la réglementation existante au niveau français, allemand et européen.
Accepter des régressions sur la protection de l’environnement
« Le droit français est plus enclin à protéger les territoires ayant une certaine valeur. Parallèlement, la tendance au sein de l’Union européenne et de la France est de mettre l’accent sur le développement de ces énergies potentiellement en acceptant des atteintes à la protection de l’environnement », poursuit la chercheuse qui souhaite s’intéresser aux décisions de justice pour étudier comment les lois sont interprétées et mises en œuvre. « Nous chercherons aussi des cas concrets dont l’analyse sera enrichie d’entretiens des acteurs de terrain et des décideurs politiques. Voir comment la perception du paysage par le public peut changer. Par exemple, si un habitant profite directement de l’énergie par une éolienne, l’atteinte au paysage sera-t-elle plus facilement tolérée ? »
D’une durée d’un an, cette recherche permettra d’identifier les failles des réglementations « certainement trop laxistes dans la protection des différents intérêts notamment au détriment des espaces naturels » et de proposer des outils pour concilier transitions énergétique et écologique. Prévu pour commencer en septembre 2021, le projet Seed Money fera suite au projet Ciera actuellement en cours. « Notre but est de consolider cet axe en vue de le proposer pour un financement plus important comme l’ANR en 2022. » La thématique s’inscrit plus largement dans le cadre du projet Interreg RES-TMO qui porte sur les énergies renouvelables dans la région du Rhin Supérieur.
Marion Riegert
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Pour la 4e année consécutive, les cinq universités membres du groupement transfrontalier Eucor - Le Campus européen ont lancé l'appel à projets Seed Money afin d'apporter un premier soutien financier aux projets transfrontaliers innovants. Le dispositif, d'un montant total de 300 000 €, soutient des projets transfrontaliers de recherche, d'innovation et de formation afin de favoriser l’échange et la mise en réseau des enseignants et des chercheurs au sein du Campus européen.