Simuler la formation des galaxies sans matière noire

27/02/2020

En modifiant les lois de la gravité de Newton, des chercheurs de Bonn et de Strasbourg ont simulé la formation de galaxies dans un Univers sans matière noire. Il en résulte des galaxies assez similaires à celles observées aujourd'hui. Une première étape qui a été publiée dans The Astrophysical Journal, mais de multiples questions restent en suspens.

La majorité des galaxies à disque comme la Voie lactée sont supportées par la rotation, ce qui signifie que les étoiles qui la composent tournent sur orbite de manière quasi circulaire. Ces galaxies sont également composées de gaz interstellaire : l’hydrogène atomique qui engendre un rayonnement radio permettant de mesurer les vitesses de rotation dans la galaxie.

Utilisées pour contraindre le champ gravitationnel dans les modèles, ces vitesses ont mené dans les années 1970/80 à un des plus grands problèmes astrophysiques modernes. Le résultat obtenu lors des calculs étant en dessous de ce qui est réellement observé. « Une des solutions proposées est la présence de matière invisible appelée matière noire dont l’influence n’était pas incluse dans le calcul », explique Benoît Famaey, chercheur à l’Observatoire astronomique de Strasbourg. La matière noire permet ainsi d’expliquer la rotation galactique, mais aussi les petites fluctuations observées dans la première lumière de l’Univers.

Modifier la loi de la gravitation

L’ensemble de ces données permet de modéliser par ordinateur la formation des petites structures de l’Univers. « Le bémol reste la matière noire. Grâce à des expériences, nous savons de plus en plus ce qu’elle n’est pas, sans savoir ce qu’elle est… Des chercheurs ont tenté de la détecter via d’éventuelles collisions avec des atomes, mais depuis 20 ans, aucune collision n’a jamais été observée. » En parallèle de cette non détection de la matière noire, les simulations des structures des galaxies, selon le modèle standard prenant en compte la loi de gravitation de Newton, ne sont pas satisfaisantes.

Benoît Famaey et ses collègues décident d’aborder le problème différemment. « Si nous n’avions que les galaxies à disposition comme traceur de la matière noire alors la solution la plus simple serait de considérer que la matière noire n’existe pas et que c’est une modification de la gravitation qui expliquerait la rotation des galaxies. » Toute la question étant de savoir si la formation des galaxies ainsi simulées ressemble à la réalité ?

Un ingrédient manquant

Pour le vérifier, les chercheurs ont créé un nuage de gaz et ont laissé évoluer la simulation. Ce nuage a commencé à former des étoiles. « Nous avons été surpris de voir que le disque obtenu était très similaire au disque des galaxies observées. Le résultat étant plus proche de la réalité que les simulations incluant de la matière noire. »

Une première étape pour Benoît Famaey, qui reste prudent. « Pour avoir une comparaison plus juste avec le modèle standard, il reste à vérifier si ce mode de calcul permet également de simuler le fonds diffus cosmologique reproduit avec succès par le modèle standard. » Une étape réalisée actuellement par des collègues de Prague. Si ces travaux pourraient un jour mener à un modèle d'Univers sans matière noire, ce n'est pas la seule piste poursuivie par le chercheur. « Mon autre hypothèse favorite est qu'elle existe mais qu'il manque un ingrédient, une interaction non prise en compte dans le modèle standard de la cosmologie. »

Marion Riegert

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