Vibrations macroscopiques et microscopiques dans une membrane en 2D

10/12/2020

Stéphane Berciaud et son équipe de l'Institut de physique et chimie des matériaux de Strasbourg (IPCMS), en collaboration avec l’université de Nottingham (Royaume Uni) ont étudié les contraintes induites par les vibrations d’une membrane d’épaisseur atomique. Leur étude, parue le 2 novembre dans le journal Nature Communications, ouvre la voie à l’étude des propriétés de nombreux autres semi-conducteurs bidimensionnels.

Au sein du Département magnétisme des objets nanostructurés (DMONS), Stéphane Berciaud et ses collègues travaillent sur les aspects fondamentaux de la matière en deux dimensions (2D). En utilisant la lumière comme sonde, ils étudient les propriétés optiques de matériaux épais seulement de quelques atomes.

Pour l’étude parue dans Nature Communications, les chercheurs ont choisi le graphène, dont les propriétés optiques et électroniques sont aujourd’hui bien connues de la communauté scientifique. « Le graphène est un feuillet cristallin d’épaisseur monoatomique, il ne peut pas y avoir plus fin comme matériau. Il peut aussi être envisagé comme une membrane, qu’il est possible de faire vibrer », explique Stéphane Berciaud.

Pour mieux comprendre l’aspect mécanique de l’étude, ce dernier utilise une image du domaine musical. « Imaginons une membrane qui vibre comme une peau de tambour, si je rajoute de la masse dessus, la fréquence vibratoire – soit le son qu’on peut entendre – permet de déterminer la valeur de la masse posée sur le capteur. C’est un procédé ancien mais qui est arrivé dans le domaine des nanosciences assez récemment. »

L’étude des propriétés optiques du graphène et celle de ses propriétés mécaniques sont majoritairement étudiées séparément. « Notre originalité c’est de faire le trait d’union entre ces deux domaines de recherche », s’enthousiasme le chercheur. L’équipe fait vibrer ses feuillets de graphène et décide de les étudier à la fois à l’échelle macroscopique mais également au niveau atomique. Pour ce faire, ils utilisent un même faisceau laser.

Des vibrations à toutes les échelles

En exploitant les interférences optiques, les chercheurs peuvent mesurer l’amplitude des vibrations macroscopiques de la membrane de graphène en tout point.

La mesure simultanée de la fréquence (nettement plus élevée) des vibrations atomiques du réseau cristallin, également appelées phonons, leur permet par ailleurs d’établir directement l’impact de l’étirement du graphène au niveau macroscopique sur les vibrations au niveau atomique.

« En résumé, le laser mesure le déplacement de la membrane, qui elle-même tire sur le réseau cristallin en vibrant, augmentant ainsi la distance inter-atomique. Nos mesures optiques permettent de quantifier la contrainte mécanique, en s’intéressant à la fréquence des phonons. C’est une approche rarement utilisée dans notre domaine », souligne le chercheur.

Vers d’autres matériaux en 2D

C’est alors que l’équipe constate un phénomène étonnant. « Nous remarquons que les contraintes observées lorsque la membrane vibre à grande amplitude sont plus importantes que ce à quoi nous nous attendions », ajoute Stéphane Berciaud.

La méthode mise en avant par l’équipe est prometteuse : elle permet d’étudier d’autres systèmes bidimensionnels, cousins du graphène. Ce dernier ne pouvant pas émettre de lumière, ces cousins pourront ouvrir de nouvelles voies d’observation des contraintes induites par vibration sur les propriétés optiques de ces matériaux.

Léa Fizzala

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