D'une insecterie à l'insectarium

Visite au coeur de l'actuel insectarium

Les moustiques piquent toujours la curiosité des chercheurs pour les parasites et les virus qu’ils transmettent. L’équipe « Anophèle » du laboratoire Réponse immunitaire des insectes (CNRS), associée à l’Inserm, étudie la résistance du moustique femelle, l’anophèle gambiae au parasite responsable du paludisme.

Cette maladie, la plus répandue au monde, tue plus de 430.000 personnes chaque année dont 90% des cas sur le continent africain.

D'ores et déjà, les scientifiques ont identifié certains gènes de l’anophèle qui l’immunisent contre le parasite du paludisme. A partir de 75 lignées de moustiques élevées sur le campus, l'équipe va pouvoir en identifier d'autres, et comprendre pourquoi certaines souches de moustiques sont plus résistantes que d’autres.

Actuellement à l’insectarium les chercheurs travaillent avec un parasite de souris, le Plasmodium berghei, comme modèle d’infection. Le nouvel insectarium permettra d’utiliser des pathogènes humains dans un environnement sécurisé aux normes internationales de confinement.

Dans ces nouvelles conditions l’équipe pourra également développer les études liées aux virus comme la dengue, le chikungunya ou encore le Zika.

Le futur insectarium sera doté d’une animalerie et d’une « nurserie » dédiée à l’élevage des moustiques. L’ouverture des portes est prévue pour fin 2017.

Odile Barthélémy

Les futurs travaux de recherche

Alors que le futur insectarium de l’IBMC sort de terre, Jean-Luc Imler ne cache pas un sentiment d’excitation. Le chercheur, à la fois responsable scientifique du projet et directeur de l’unité propre de recherche du CNRS « Réponse immunitaire et développement chez les insectes » (Ridi), a de quoi se réjouir. Une fois achevé, cet insectarium dernier cri permettra aux scientifiques de travailler dans des laboratoires de haute sécurité biologique. Et cela change tout…

Sas chimiques, mise en dépression et filtration de l’air intérieur… Le futur insectarium de l’IBMC ne fera l’impasse sur aucune des normes internationales de confinement. Et pour cause ! Ce laboratoire de niveau P3 abritera des moustiques vecteurs de pathogènes humains tels que l’agent du paludisme chez l’homme mais aussi des virus comme celui de la dengue, du chikungunya ou encore Zika. En les manipulant dans des conditions de sécurité optimales, les chercheurs du Ridi entendent comprendre de quelle façon ces pathogènes infectent les moustiques et comment ces derniers se défendent, des études essentielles pour développer de nouveaux moyens de lutte.

Les scientifiques vont pouvoir donner un second souffle à leurs recherches.  « Une de nos équipes travaille sur l’immunité antivirale de la drosophile depuis une dizaine d’années, explique Jean-Luc Imler. Nous avons déjà fait plusieurs découvertes sur les mécanismes de résistance aux virus qui touchent cette mouche. Nos travaux suggéraient que des mécanismes identiques existaient chez les moustiques. Malheureusement, faute d’espaces confinés, nous ne pouvions pas vérifier nos hypothèses sur des moustiques porteurs de virus dangereux pour l’homme. »

Des moustiques à la loupe dans des conditions de sécurité optimales

Dans un climat de recherche très concurrentiel, il n’aura pas fallu longtemps pour que des chercheurs américains et australiens ne leur dament le pion. « Un peu frustrant », confie le directeur du Ridi. Mais le laboratoire strasbourgeois est en passe de retrouver un coup d’avance. « Nous avons noué un partenariat avec le Brésil pour mener des expériences sur la dengue et nous venons d’obtenir 100 000 euros de la Commission européenne pour travailler sur Zika. Pour l’instant, les expériences ont lieu au Brésil mais nous pourront bientôt les réaliser à Strasbourg. » Les scientifiques auront alors toute latitude pour travailler sur la drosophile et le moustique en parallèle. « Dès lors que nous découvrons une molécule intéressante chez la drosophile, l’objectif est de vérifier si elle existe également chez le moustique. »

Décrypter les dessous génétiques de l’immunité chez les insectes

Si les chercheurs du Ridi consacrent autant d’efforts à l’étude du système immunitaire des insectes, c’est que ces derniers sont loin d’être passifs face aux pathogènes qu’ils véhiculent. « Les insectes, qui représentent une biodiversité très importante, ont co-évolué avec des bactéries, des virus, des champignons pendant des centaines de millions d’années. Ce faisant, ils ont développé des mécanismes de défense efficaces ». Certaines lignées de moustiques parviennent ainsi à éliminer de leur organisme le parasite responsable du paludisme. Si bien que ces diptères ne transmettent pas la maladie à l’homme. Décrypter les dessous génétiques de ces mécanismes développés au cours de l’évolution apparaît donc comme une stratégie de recherche prometteuse pour développer de nouvelles cibles thérapeutiques. « Si un insecte a trouvé une faille chez un virus ou un parasite et s’en sert pour le neutraliser, nous avons tout intérêt à comprendre comment il s’y prend », fait valoir Jean-Luc Imler.

Chaque année,  800 000 personnes succombent aux maladies infectieuses transmises par les moustiques. « Les virus sont des menaces émergentes et imprévisibles, prévient le chercheur. Dans quelques années, il y a tout à craindre qu’un nouveau Zika fasse son apparition. » Face à cette éventualité, le futur insectarium, prévu pour être opérationnel fin 2017, constituera une plateforme expérimentale précieuse.

Ronan Rousseau

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